J'AVAIS 13 ANS À AUSCHWITZ/ KARINE SICARD BOUVATIER

LA MARTINIÈRE JEUNESSE

2025

9791040122180

13 ANS ET +

: Troisième volet de témoignages sur ce thème. "J'avais 13 ans à Auschwitz". Comment ne pas se crisper ou fondre devant ce titre?

Le préambule nous précise que les témoins, des enfants à l'époque des derniers convois vers les camps, avaient même 4 ans, 9 ans, pour les plus jeunes. Contrairement aux autres volets, sont intérrogés ici des rescapés européens, des étrangers de notre point de vue français, leur histoire ressemble à celle des juifs de notre pays français, trahis, cloisonnés dans des ghettos, marqués d'une étoile, puis expédiés dans des camps sous de faux prétextes. Et notre esprit pourra faire un calcul, l'horreur d'une collaboration française reproduite en Pologne, en Slovaquie, en Italie, en Belgique, en Hongrie...

La protection des parents, l'innocence et la bienveillance d'autres grandes personnes pour les préserver, restera un souvenir, une impression forte qui aidera à filtrer la dureté du mauvais traitement et de la haine ressentie, jadis et encore au moment des confidences.

Un documentaire pour les ados et une énième volonté de transmettre aux jeunes générations pour qu'ils sachent qu'il faut être confiant en l'avenir, mais que pour voir loin, garder la tête haute et maintenir intact des valeurs d'humanité, une confiance aveugle n'est pas possible..Que la corruption morale ne peut se dédouaner d'un "Oh non, je ne pense pas que cela aille aussi loin, c'est juste pour la leçon, nous ne sommes pas des monstres tout de mêmes..." et ainsi se rassurer pour tourner la tête. L'homme peut être un loup pour l'homme, n'oublions pas qu'un jour les décisions politiques égoïstes, xénophobes des adultes peuvent décider du sacrifice d'une partie du monde pour en sauver une autre, pour que ces électeurs vivent confortablement et sereinement. La fin des camps de concentrations commémore ses 80 ans, nous rappelant durement nos faiblesses, certains hommes et femmes auront emprunté de terribles raccourcis pour régler une crise économique allemande, entrainant ainsi le monde entier dans une guerre destructrice, et une bonne partie de la communauté juive à la mort ...

La 1ère de couverture malgré le titre donnera envie, des photos en duo, enfants et anciens, des rescapés des camps posant d'un visage souriant ou détendu, liés par l'âge et la confidence du livre.

Le ton est doux mais c'est forcément aussi choquant qu'émouvant.

Le récit de Tatianna, déportée à 6 ans de l'annexe italienne Fiume (l'actuelle Rijeka,

ville de Croatie) en 44.

Supposée jumelle avec sa soeur et convoitée par Mengele* pour ses expériences infantiles. Elle y échappera tandis que sous le prétexte d'un dernier au revoir à leur maman vers un autre barraquement, d'autres enfants comme son cousin serviront de cobaye pour lutter contre la tuberculose et en mourront. (Josef Mengele

médecin allemand, criminel de guerre nazi *)

Tatiana: "... ils étaient là,un peu comme dans le film de Benigni[La vie est belle]. Un peu dans le brouillard. Ce film m'a rappelé que nous jouions autour des morts. Il y avait une petite baraque tout près de la nôtre, avec les portes toujours ouvertes et pleines de cadavres, comme une espèce de pyramide, et nous, les enfants, nous jouions là, comme ça, tous ensemble. J'ai compris d'autres choses en grandissant, peut-être même quand j'ai eu des enfants à mon tour. J'ai compris que le jeu, pour les enfants, c'est la vie et qu'ils sont capables de jouer dans n'importe quelle situation, même tragique comme la nôtre..."

Un documentaire poignant, sincère et très utile, pour conserver un regard sur un essentiel vital et sain. Écouter la voix des anciens leur permettra de poser un regard sur notre époque, sur les nouvelles générations et inversement invitera les jeunes ados à considérer une autre époque que la leur. Comment vivait on avant? Aurais-je pu vivre aussi librement qu'aujourd'hui dans mes actes et mes paroles au même âge que ces résistants?

Un documentaire qui n'inspirera pas la culpabibilité mais le respect et l'humilité.